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Une hausse historique du taux d’activité des seniors

Jamais les seniors en activité n’ont été aussi nombreux en France.

C’est ce que révèle l’étude 2025 de l’Insee intitulée Emploi, chômage, revenus du travail, rendue publique le 26 juin.

Depuis les années 2000, le taux d’activité des 50-64 ans a bondi de 18 points, marquant une transformation profonde du paysage de l’emploi.

En 2024, près de 45 % des 60-64 ans étaient encore en activité, contre seulement 10 % au début des années 2000.

Ce chiffre atteint un sommet jamais observé depuis que les premières données de ce type sont collectées (1975).

Cette progression s’est accélérée nettement depuis l’entrée en vigueur de la réforme des retraites de 2023, qui a repoussé l’âge légal de départ.

Selon Vladimir Passeron, chef du département emploi et revenus d’activité à l’Insee, cette réforme a agi comme un déclencheur majeur.

On observe un effet immédiat et puissant, surtout chez les personnes proches de la retraite, explique-t-il.

Une conséquence directe des réformes successives

La tendance actuelle s’inscrit dans la continuité des réformes engagées depuis plus de quinze ans.

Déjà, les réformes de 2010 et 2014 avaient modifié les paramètres de départ à la retraite, allongeant la durée de cotisation et incitant les salariés à prolonger leur activité professionnelle.

Mais celle de 2023, qui a formellement reculé l’âge légal de départ à 64 ans, produit un impact structurel plus marqué, notamment chez les plus de 60 ans.

Ce phénomène est renforcé par un effet mécanique lié aux stratégies d’entreprise, que l’Insee qualifie d’ effet horizon: les employeurs, anticipant un allongement de la carrière, conservent leurs salariés plus longtemps.

L’impact différencié selon l’âge et le genre

L’étude de l’Insee souligne que toutes les tranches d’âge ont vu leur taux d’activité augmenter depuis les années 2000, mais la progression est nettement plus rapide chez les seniors.

Évolution par Tranche d’Âge sur 25 Ans
👥 Tranche d’âge 📈 Progression
50–64 ans +18 points en 25 ans
18–50 ans +5 points en 25 ans

 

Cette dynamique s’explique aussi par l’entrée massive des femmes sur le marché du travail dans les années 1980-1990, ce qui commence à se ressentir dans les statistiques des générations arrivant aujourd’hui à l’âge de la retraite.

Si l’écart entre les sexes reste perceptible, il se réduit visiblement. « L’effet de la réforme de 2023 serait même plus important chez les femmes », observe Vladimir Passeron.

En effet, de nombreuses femmes cessaient de travailler dès l’ouverture de leurs droits à la retraite. Avec le recul de l’âge légal, elles prolongent désormais leur carrière.

Taux d’activité vs taux d’emploi : deux réalités à ne pas confondre

Un élément clé de l’analyse de l’Insee consiste à distinguer le taux d’activité (personnes qui ont un emploi ou en cherchent un) du taux d’emploi (personnes effectivement en poste).

Chez les seniors, la différence entre les deux est très faible, car le chômage reste relativement faible dans cette tranche d’âge.

En 2024, le taux d’activité des 60-64 ans avoisine les 45 %, un chiffre quasiment équivalent à leur taux d’emploi.

Autrement dit, la majorité des seniors en activité sont bel et bien employés.

Ce constat est essentiel pour comprendre que l’allongement de la durée d’activité ne se traduit pas par une explosion du chômage chez les plus de 60 ans.

Au contraire, beaucoup parviennent à conserver leur emploi ou à en retrouver un, en particulier dans les secteurs à forte demande de main-d’œuvre expérimentée.

Une dynamique positive, mais à surveiller

À première vue, cette progression peut être perçue comme positive pour l’économie.

Elle permet de maintenir un socle de travailleurs expérimentés, de renforcer les cotisations sociales et de ralentir le déséquilibre des régimes de retraite. Mais ce tableau encourageant ne doit pas occulter certaines fragilités.

L’Insee appelle à une vigilance accrue sur plusieurs indicateurs, dont :

  • L’espérance de vie en bonne santé : vivre plus longtemps ne signifie pas forcément travailler plus longtemps en bonne condition.

  • La précarité des seniors : certains restent en activité par nécessité, et non par choix.

  • L’accès à l’emploi des femmes de plus de 55 ans, souvent pénalisées par des carrières discontinues.

  • L’effet sur l’emploi des jeunes, qui pourraient faire face à une concurrence accrue.

Une transformation sociale et culturelle en cours

Cette dynamique marque également une transformation des représentations sociales autour de la vieillesse et du travail.

Là où l’on considérait autrefois la soixantaine comme l’âge du repos bien mérité, on observe désormais une revalorisation des seniors comme actifs, utiles, compétents et disponibles.

Certaines entreprises ont même revu leurs politiques internes pour accompagner cette évolution : adaptation des postes, formations continues, télétravail partiel, allègement des tâches physiques… Des initiatives encore trop rares mais en croissance, qui favorisent le maintien en emploi dans des conditions dignes.

L’apprentissage et la reconversion au service des plus âgés

Autre fait marquant : le développement de l’apprentissage et de la formation continue touche désormais les seniors également.

Dans un marché du travail en mutation rapide, certains seniors font le choix, ou la nécessité, de changer de métier, se former ou se reconvertir.

Les dispositifs publics comme le CPF (Compte Personnel de Formation) ou le contrat de professionnalisation sont désormais de plus en plus accessibles aux plus de 50 ans, ce qui favorise leur retour à l’emploi ou leur repositionnement professionnel.

Des projections qui confirment une tendance durable

Les projections de l’Insee sont claires : la hausse du taux d’activité des seniors se poursuivra jusqu’en 2035, portée par les générations issues du baby-boom et par les effets différés de la réforme de 2023.

Avant cette réforme, l’Insee prévoyait un taux d’activité des 60-64 ans autour de 60 % à l’horizon 2030.

Désormais, les nouvelles données l’estiment à 70 % ou plus, soit un changement de cap profond.

Mais cette évolution ne sera bénéfique que si elle s’accompagne de mesures d’adaptation structurelle, notamment en matière de santé au travail, de lutte contre la pénibilité, de reconversion, et de lutte contre les discriminations liées à l’âge.

Conclusion : une nouvelle ère pour les seniors au travail

La hausse du taux d’activité des 50-64 ans n’est plus une tendance passagère : c’est une mutation profonde et durable du marché de l’emploi français.

Cette génération, longtemps mise à l’écart dans les politiques d’emploi, devient aujourd’hui un pilier de la société productive.

Toutefois, cette transformation ne doit pas masquer les défis humains, sociaux et sanitaires qu’elle implique.

Travailler plus longtemps ne peut être viable que si chacun y trouve un cadre sécurisé, une reconnaissance professionnelle et un accompagnement adapté.

Les prochaines années seront décisives pour savoir si cette évolution profitera pleinement aux individus comme à la collectivité.

La valorisation du travail des seniors passera par des politiques actives, inclusives et bienveillantes.

Les chiffres sont encourageants, mais la réalité humaine doit rester au cœur du débat.

  • Emilly Correa est titulaire d'un diplôme en journalisme et d'un diplôme de troisième cycle en marketing numérique, spécialisé dans la production de contenu pour les médias sociaux. Forte d'une expérience en rédaction publicitaire et en gestion de blog, elle combine sa passion pour l'écriture avec des stratégies d'engagement numérique. Il a travaillé dans des agences de communication et se consacre désormais à la production d'articles informatifs et d'analyses de tendances.