Nouvelle Réglementation sur les Véhicules de Fonction : Des Avantages en Nature Plus Strictement Encadrés
✅ Contexte : Une réforme fiscale aux conséquences concrètes
Le 28 février 2025, un arrêté publié au Journal officiel par les ministères de l’Économie et du Travail a modifié en profondeur les modalités de calcul des avantages en nature liés à l’usage de véhicules professionnels mis à disposition des salariés.
Cette décision marque un tournant significatif dans la politique gouvernementale en matière de fiscalité automobile, avec pour objectif affiché de favoriser l’électrification des flottes d’entreprise, tout en augmentant la transparence fiscale sur les usages privés.
Jusqu’à présent, la valorisation de l’usage privé d’un véhicule de fonction était relativement avantageuse, notamment dans le cas des contrats de location.
Désormais, les règles s’alourdissent de manière notable pour les voitures thermiques et hybrides, tandis que certains allègements subsistent pour les véhicules 100% électriques répondant à des critères environnementaux stricts.
Nouvelles bases de calcul des avantages en nature
Type de véhicule | Avant la réforme | Après la réforme |
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🚘 Véhicules en location (leasing) | 30 % du coût annuel total (incluant entretien et assurance) | 50 % du coût annuel total (incluant entretien et assurance) |
🚗 Véhicules achetés par l’entreprise | 9 % du coût global | 15 % du coût global |
Cette nouvelle méthode de calcul s’applique de façon rétroactive à tous les véhicules acquis ou loués à partir du 1er février 2025.
Il a été précisé que l’utilisation privée des véhicules mis à disposition par l’employeur doit désormais être déclarée comme un revenu complémentaire, soumis à l’impôt sur le revenu et aux cotisations sociales.
Une fiscalité allégée pour les véhicules 100% électriques
Dans le cadre de sa politique environnementale, le gouvernement a toutefois introduit une mesure d’atténuation pour les véhicules propres.
Un abattement fiscal exceptionnel de 70 % est applicable à condition que le véhicule respecte le barème de l’éco-score mis en place par l’État.
Ce système vise à encourager l’achat ou la location de véhicules à faible empreinte écologique, produits de préférence en Europe.
Détails des mesures favorables aux véhicules électriques :
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L’électricité consommée pour la recharge du véhicule au sein de l’entreprise n’est pas prise en compte dans le calcul de l’avantage en nature.
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Si la recharge est effectuée à domicile, seules 50 % des dépenses sont intégrées dans la base de calcul.
Ces incitations fiscales reflètent une volonté manifeste d’orienter les choix des entreprises vers des flottes plus respectueuses de l’environnement.
Toutefois, en l’absence d’une transition technologique rapide dans les entreprises, ces nouvelles règles risquent de provoquer des tensions sur le terrain.
✅Objectif : Accélérer l’électrification des flottes d’entreprise
Alors que les particuliers adoptent progressivement les véhicules électriques, les entreprises semblent plus lentes à suivre cette tendance.
Le gouvernement entend donc les inciter, par la contrainte fiscale, à accélérer leur transition.
En effet, selon plusieurs études sectorielles, moins de 20 % des véhicules de société mis en circulation en 2024 étaient entièrement électriques.
La nouvelle réglementation est donc conçue comme un levier pour inverser cette dynamique. Elle introduit un désavantage fiscal plus marqué pour les véhicules thermiques et hybrides tout en maintenant certains avantages pour les modèles électriques conformes aux normes environnementales.
✅ Réactions du secteur automobile : inquiétudes et critiques
Une absence de concertation dénoncée
Du côté des acteurs du secteur, la réaction n’a pas tardé. La fédération Mobilians, représentant les entreprises de services de l’automobile, a vivement critiqué l’adoption de ce texte sans véritable dialogue préalable.
Dans un communiqué, elle regrette “l’absence de concertation sur un texte majeur pour ses entreprises et leurs salariés”, soulignant les contradictions entre les discours publics de simplification administrative et l’augmentation de la complexité réglementaire.
Des difficultés d’interprétation et d’application
Mobilians alerte également sur la technicité accrue de la réforme, qui risque de générer des erreurs d’interprétation et d’importants écarts de traitement entre les entreprises.
Pour de nombreux gestionnaires de flottes, le nouveau mode de calcul implique des ajustements logiciels, comptables et juridiques, dont les coûts sont loin d’être négligeables.
L’appel au report de la réforme
Le Syndicat des loueurs de véhicules en longue durée (Sesamlld), de son côté, a exprimé sa préoccupation quant au calendrier d’entrée en vigueur de la réforme.
Selon ses représentants, un délai de mise en œuvre serait indispensable afin de laisser aux entreprises le temps de s’adapter.
Dans un communiqué distinct, Sesamlld indique que cette réforme “bouscule profondément le cadre existant et crée une nouvelle instabilité pour les entreprises comme pour les salariés”.
Le syndicat demande explicitement le report de l’application des nouvelles règles, afin de permettre une transition maîtrisée, tant pour les gestionnaires de parc automobile que pour les bénéficiaires de ces véhicules.
✅ Analyse approfondie des impacts fiscaux et sociaux
Pour les salariés : un pouvoir d’achat en recul
La revalorisation des avantages en nature entraînera une hausse de l’impôt sur le revenu pour les salariés concernés.
En conséquence, une partie de leur rémunération indirecte sera davantage taxée, ce qui se traduira, à terme, par une réduction du revenu net disponible.
Les salariés les plus impactés seront ceux disposant de véhicules thermiques récents ou de SUV haut de gamme.
En revanche, ceux bénéficiant de véhicules électriques produits en Europe et rechargeant sur leur lieu de travail seront relativement épargnés.
Pour les employeurs : un coût administratif accru
Du côté des entreprises, cette réforme implique un renforcement des obligations déclaratives et un recalcul systématique des avantages imposables.
De nouveaux outils de gestion et de comptabilité devront être adoptés, et la gestion des flottes devra être revue en profondeur, notamment pour intégrer les critères de l’éco-score.
Les sociétés disposant de grands parcs automobiles devront envisager une révision complète de leur stratégie de mobilité.
Cela pourra inclure la négociation de nouveaux contrats de leasing, la mise en place de bornes de recharge, ou encore la formation des salariés à l’utilisation de véhicules électriques.
✅ Enjeux économiques et environnementaux à long terme
Une fiscalité au service de la transition écologique
À travers cette réforme, l’État entend jouer pleinement son rôle d’acteur incitatif.
En alourdissant la fiscalité des véhicules polluants et en récompensant l’usage de technologies plus vertes, le gouvernement cherche à aligner les intérêts fiscaux et environnementaux.
Ce levier fiscal s’inscrit dans une stratégie plus large de décarbonation du parc automobile, qui inclut déjà des primes à la conversion, des zones à faibles émissions, et une interdiction progressive des moteurs thermiques dans certaines métropoles à l’horizon 2035.
Un impact mesurable à surveiller
Il conviendra toutefois de mesurer l’efficacité réelle de cette réforme.
Sans accompagnement financier ciblé pour les petites entreprises, l’adoption massive de véhicules électriques pourrait rester limitée.
De plus, l’offre industrielle européenne devra suivre pour que les véhicules conformes à l’éco-score soient disponibles en nombre suffisant.
✅ Conclusion : une réforme ambitieuse, mais délicate à mettre en œuvre
La réforme du calcul des avantages en nature pour les véhicules de fonction, bien qu’orientée vers une transition écologique, soulève de nombreuses interrogations.
Si les objectifs environnementaux sont clairs, les modalités pratiques et l’impact sur le pouvoir d’achat posent problème.
Le gouvernement devra sans doute clarifier certaines zones d’ombre réglementaires, tout en proposant un accompagnement adapté aux acteurs économiques concernés.
À l’heure où la compétitivité des entreprises est plus que jamais sous pression, toute réforme doit faire preuve d’équilibre entre ambition environnementale et faisabilité opérationnelle.